Retour sur la conférence « Changer le monde : le droit comme levier »
Le 24 octobre 2025, à l’occasion du premier anniversaire du collectif « Bâtonnières du Monde », réunissant une quarantaine de bâtonnières et vice-bâtonnières venues des cinq continents, s’est tenue la conférence internationale intitulée « Changer le monde : le droit comme levier », dans la prestigieuse Salle du Conseil de Paris, à
l’Hôtel de Ville.
Le droit au service de la transformation sociale
Vanessa Bousardo, vice-bâtonnière de Paris a introduit cette matinée en revenant sur cette première année de « Bâtonnières du Monde », créé sous son impulsion. Elle a salué la force du collectif, né d’une conviction commune : l’égalité se construit par le droit, au-delà des frontières.
La conférence s’est ensuite ouverte par la retransmission du discours d’Aurore Bergé, ministre de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations, qui a rappelé que « le droit doit être un actif de transformation sociale ».
Puis, dans une keynote inspirante intitulée « Le droit, la morale et le leadership des valeurs », Élisabeth Moreno, ancienne ministre, présidente du conseil d’administration de Ring Capital et de Ring Africa, a rappelé que « dans un monde où le pouvoir oublie la morale, où les droits reculent et où les certitudes vacillent, le droit demeure une boussole, et celles qui le défendent, des gardiennes de la conscience humaine ».
Cette introduction a donné le ton d’une matinée riche en échanges, articulée autour de trois tables rondes qui ont fait dialoguer droit, égalité, technologie et leadership féminin.
Protéger : le droit comme levier
La première table ronde, « Protéger : le droit comme levier », modérée par Vanessa Bousardo, vice-bâtonnière du barreau de Paris, a été consacrée à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles.
Isabelle Rome, ambassadrice pour les droits de l’Homme, a rappelé son engagement de longue date dans ce combat et souligné combien la victime demeure encore trop souvent isolée et suspectée par son entourage, qu’il soit amical ou professionnel.
Laure Beccuau, procureure de la République, a insisté sur la mobilisation nécessaire de l’ensemble de l’institution judiciaire pour faire évoluer le droit et lever les obstacles à la parole des victimes.
Enfin, Maria Luisa Ordonez, procureure espagnole a illustré l’importance des dispositifs institutionnels pour garantir une réparation effective.
De ces échanges est ressortie une conviction partagée : pour être un véritable levier, le droit doit se conjuguer à des politiques publiques ambitieuses, à une justice réactive et à un changement profond des mentalités.
Promouvoir : l’égalité comme levier
La deuxième table ronde, « Promouvoir : l’égalité comme levier », animée par Benjamin Pitcho, avocat et directeur de cabinet du bâtonnier et de la vice-bâtonnière, s’est attachée à la question du leadership et de la gouvernance féminine.
Les intervenants, Christine Debouzy, présidente de l’Association française des femmes pilotes, Anne-Gabrielle Heilbronner, membre du management board du groupe Publicis, Ronan Nguyen-Van, directeur juridique RH chez L’Oréal, et Barbara Sessa, PDG de Mastercard France, ont échangé sur l’importance de l’éducation comme moteur de l’égalité et du leadership féminin comme catalyseur du changement. Tous ont souligné la nécessité, pour les entreprises comme pour les institutions, de s’emparer de ces enjeux en mettant en place des stratégies et des bonnes pratiques pour transformer les mentalité et promouvoir activement le leadership féminin.
Anticiper : l’intelligence artificielle comme alliée
Tournée vers l’avenir, la troisième table ronde, « Anticiper : l’IA comme alliée », a exploré les défis et les opportunités que représente l’intelligence artificielle pour le monde du droit.
Modérée par Theresa L. Johnson, bâtonnière de San Francisco, elle a réuni Aline Crépin, directrice générale adjointe Up Skills, Nannette Lafond-Dufour, Chief Impact Officer du groupe Publicis et présidente du Women’s Forum for the Economy and Society, ainsi que Tanya Perelmuter, co-fondatrice et directrice de la stratégie de la Fondation Abeona.
Les intervenantes ont pointé le risque d’une reproduction, voire d’une amplification des stéréotypes sexistes contenues dans les données dont l’IA se nourrit, et ont appelé à transformer ce risque en opportunité : faire de l’IA un outil au service d’une justice plus égalitaire, inclusive, et humaine.
Les discussions également ont souligné que la maîtrise de l’IA ne peut être abordée uniquement comme un enjeu technique, mais comme une question éthique, institutionnelle et sociale.
Cette matinée a permis de rappeler que les avocates, les avocats, et plus largement toutes les actrices et acteurs du droit, ne sont pas de simples observateurs : ils sont au cœur de la transformation sociétale.
Le collectif « Bâtonnières du Monde » en est une belle illustration : comme l’a rappelé Vanessa Bousardo, vice-bâtonnière de Paris : « Hier, nous étions une quinzaine. Aujourd’hui, nous sommes plus de quarante, unies pour la promotion des droits des femmes. Et ce n’est, j’en suis sûre, qu’un début ».