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Hard brexit or not ? That is the question !

Mis à jour le 27 avril 2021

À l’instar d’Hamlet recherchant sa raison de vivre en plein tumulte, le 15 mars 2019, le Royaume-Uni refusait de quitter l’Union européenne, sans pour autant ratifier l’accord qui lui était proposé. À ce jour, la question du maintien de Theresa May au poste de Premier ministre est posée.

Quelques étapes doivent être rappelées pour restituer la dynamique de cette question.

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Brexit, où en est-on ?

Le 23 juin 2016, lors d'un référendum organisé par l'ancien Premier ministre David Cameron, 51,9% des Britanniques ont choisi de quitter l’Union européenne (UE).

Le 29 mars 2017, le Royaume-Uni (RU) a notifié son intention de se retirer de l’UE, ouvrant un délai de deux ans à des négociations qui devaient s’achever le 29 mars 2019.

Le 14 novembre 2017, un accord de maintien des droits et de prorogation de délai a été conclu et entériné par le gouvernement britannique sur proposition des négociateurs de l’UE (Groupe UE 27).

Il a été rejeté par le Parlement britannique le 15 janvier 2019.

Depuis le 29 mars 2019, trois dénouements sont possibles : soit une sortie avec accord, soit une sortie sans accord, soit un report du délai de l’article 50 du Traité de l’Union européenne (TUE).

À ce jour, le délai ultime de l’article 50 pour trouver un accord a été repoussé au 12 avril prochain.

Accord ou désaccord ?

En dépit de quelques 17 mois de négociations et en raison d’un nouveau rejet par le parlement britannique, le projet final d’accord de retrait entre le Royaume-Uni et l’Union européenne, proposé par Theresa May, n’a pas vocation à s’appliquer. Cette option semble reportée sine die.

Par ailleurs, l’hypothèse du « Hard Brexit », c’est-à-dire d’une sortie du Royaume-Uni sans aucun accord, a souvent été agitée par la Première ministre britannique comme une menace risquant de s’abattre à la fois sur son pays et sur l’UE.

Dans ce cas, le statut juridique du Royaume-Uni deviendrait celui d’un État tiers à l’Union européenne, ce qui le placerait sous le droit de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) dont celle-ci est membre.

À ce jour, si Theresa May ne trouve pas d’accord avec les travaillistes, le risque de sortie sans accord sera réel le 13 avril 2019.

Ce cas a toutefois été anticipé, c’est l’objet de l’ordonnance du 6 février 2019 dont l’optique est de pallier tout vide juridique.

Que prévoit l’ordonnance n° 2019-76 ?

L’ordonnance n° 2019-76 du 6 février 2019 a été publiée au Journal officiel du 7 février : elle contient des mesures de préparation au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne en cas de « Hard Brexit ».

Elle accorde le bénéfice de la nationalité européenne aux ressortissants britanniques exerçant légalement en France et précise que les ressortissants britanniques exerçant leur activité en France à la date du retrait du Royaume-Uni conservent le bénéfice de la reconnaissance des qualifications professionnelles, sans limitation de durée (art. 9 et 10).

Son article 11 souligne que les ressortissants d’un État membre de l’Union européenne (UE) conservent le bénéfice, pour l’exercice de leur profession en France, de la reconnaissance des qualifications professionnelles acquises au Royaume-Uni avant son retrait de l’UE.

L’article 13 quant à lui prévoit que les avocats exerçant sous leur titre d’origine (solicitors ou barristers) peuvent continuer d’exercer pendant un an à compter de la date du retrait. Durant ce délai, ils peuvent déposer une demande d’intégration au barreau de Paris en qualité d’avocat à la Cour, à condition d’avoir exercé pendant trois ans en France. Passé ce délai, une procédure d’omission est organisée.

Concernant les personnes morales, l’article 15 précise que les ressortissants britanniques qui détiennent directement ou indirectement des parts de capital social et droits de vote à la date du retrait peuvent les conserver. En revanche, ils ne pourront acquérir de nouvelles parts et de nouveaux droits de vote après le Brexit.

Son article 16 dispose que les succursales de groupements d'exercice régis par le droit du Royaume-Uni, inscrites sur la liste spéciale d'un barreau français, peuvent poursuivre leur exercice en France. En revanche, aucune nouvelle succursale de personnes physiques ou morales régies par le droit du Royaume-Uni ne pourra être créée en France après la date du retrait du Royaume-Uni.

Les dispositions de cette ordonnance ne s’appliqueront qu’en cas de « Hard Brexit », c’est-à-dire de sortie sans aucun accord, ni sur un report de délai, ni sur le fond.

La position du gouvernement français est celle de la fermeté, Emmanuel Macron ayant souligné que « si un délai additionnel était demandé, il faudrait alors qu'on nous explique pour quoi faire (...). Ce ne peut être pour renégocier un accord que nous avons négocié durant de nombreux mois et dont nous avons dit qu'il n'était pas renégociable ». L’UE, par la voix du président du Conseil européen Donald Tusk, suggère quant à elle au Royaume-Uni un changement de position afin de trouver rapidement un accord définitif.

Si un nouveau report du délai est accepté au 22 mai 2019, comme sollicité par le Royaume-Uni, il restera membre de l’Union européenne jusqu’à cette date. Durant cette nouvelle période, les négociateurs vont devoir tenter de trouver un nouvel accord. Bien plus que la préparation d’une sortie de l’UE, les semaines à venir vont dessiner durablement la nature des relations politiques ainsi qu’économiques, et révéler ou non la naissance de multiples chantiers contractuels et juridiques.

Pendant ce temps, qu’a fait le barreau de Paris ?

Aux avant-postes et afin d’anticiper toutes les hypothèses, l’Ordre a depuis le début de l’année 2018 créé une commission Brexit au sein de la commission internationale, constitué un groupe de travail avec le CNB, et porté auprès de la Chancellerie des propositions innovantes qui ont été retenues dans l’ordonnance n° 2019-76 pour les confrères et les structures impactées par le Brexit, tant à Londres qu’à Paris.

Plusieurs rapports ont été présentés au conseil de l’Ordre, afin de permettre une anticipation des évolutions, et notamment une modification du Règlement intérieur du barreau de Paris (RIBP) en créant les conventions organiques transnationales ouvertes à tous les États, y compris hors UE (article P. 49-4).

Cela correspond résolument et pleinement à la vocation internationale du barreau de Paris.

Si Paris est une grande place de droit, c’est grâce à sa dimension internationale et européenne que l’Ordre entend non seulement préserver mais également promouvoir, sous réserve de réciprocité.

Les chambres internationales du Tribunal de commerce et de la Cour d’appel, la présence de centres d’arbitrage de référence comme la Chambre de commerce et d’industrie (CCI), et plus généralement l’ouverture internationale du barreau de Paris, concourent en effet à une attractivité favorable à chacun.

L’Ordre est depuis l’annonce du Brexit quotidiennement mobilisé afin d’anticiper les difficultés suscitées par un éventuel échec des négociations.

Après des actions d’identification des enjeux, un dialogue constant avec les pouvoirs publics et nos homologues britanniques (SRA, Bar Council) a été établi, pour permettre l’élaboration et la mise en œuvre de solutions opérationnelles pour les confrères et structures concernés quelle que soit l’issue des négociations en cours.

L’Ordre des avocats est et restera mobilisé afin de permettre un exercice serein et efficace au bénéfice de tous.

Florent Loyseau de Grandmaison, membre du conseil de l’Ordre, secrétaire de la commission de l’Exercice, les membres de la commission Brexit, ainsi que les membres du service Relations internationales et du service de l’Exercice professionnel, se tiennent à votre disposition pour répondre à vos questions.